Le temps de la participation citoyenne

  • 19 février 2025

Actualités du réseau Citoyenneté

Les questions de participation citoyenne sont aujourd’hui au cœur de nombreuses politiques publiques, notamment celles liées à l’éducation, à la culture, au social…

Le mercredi 12 février, l’Ariège, à l’initiative du PETR, accueillait Jo Spiegel, à Saverdun.

Jo Spiegel a été maire de la ville de Kingersheim, en Alsace, entre 1989 et 2020. Il est reconnu aujourd’hui pour avoir développé un concept de « démocratie-construction ».

Ce qu’il propose, c’est un renouveau démocratique, à une époque qui se distingue par une crise de la démocratie.

« On change de regard seulement si on adopte une autre vision du pouvoir, de la décision et de la politique » dira-t-il.

Les conventions Territoriales Globales (CTG), les Projets Éducatifs de Territoire, les dispositifs d’accompagnement à la parentalité…prônent l’implication citoyenne, la mise en réseau des acteurs, les alliances éducatives, la participation des familles…

A Kingersheim, Jo Spiegel garde en mémoire ce jour où il a pris conscience, avec effroi, qu’il faisait de la politique « à l’ancienne » : celle qui se réclame de la démocratie mais la réduit au seul droit de vote, celle où toutes les décisions sont prises dans un entre soi.

Avec ses équipes successives, il s’est alors mis à construire, lentement et patiemment, un autre paradigme pour redonner un vrai pouvoir d’élaboration et de décision aux habitants.

Kingersheim, lieu d’une fascinante expérimentation, véritable « fabrique de démocratie », est aujourd’hui un modèle dont nombre de municipalités s’inspirent.

La démocratie – construction, c’est accepter une transition qui va du « Je » vers le « Nous », de l’intérêt particulier vers l’intérêt général, de la vision à moyen terme, vers la vision à long terme.

Ce n’est pas faire pour les habitants mais avec les habitants, c’est un côte-à-côte co-productif, c’est se poser la question du commun.

« En démocratie-construction, toute décision est considérée comme un processus, pour atteindre la haute qualité démocratique. Il faut favoriser la réciprocité des échanges, soit tout l’inverse des réseaux sociaux où chacun est dans sa bulle. Le processus revendique la lenteur. Nous parlons ici de « slow démocratie » : assumer l’altérité des débats et des décisions pour le bien commun. La démocratie doit prendre le temps de la maturation pour affronter ce que Edgar Morin appelle « la complexité ».

Mais comment associer les citoyens à la décision ? Comment susciter l’intelligence collective ? Comment faire prévaloir la raison sur les pulsions, le parler-vrai sur les « fake-news », l’exigence du dialogue sur la jouissance des affects et du buzz. Quelle est l’échelle pertinente de décision ? Comment être répartiteur de solidarité ? Comment être dans une logique de coopération entre les communes, entre les acteurs… 

A Kingersheim ça ne se fit pas avec des réunions de quartier, pas non plus avec des relations verticales, mais avec la mise en œuvre d’un écosystème pour inciter les gens à s’impliquer. Ce fut des diagnostics en marchant, là où on chemine ensemble pour diagnostiquer ce qui ne va pas et construire ensemble des solutions ; ce fut des rencontres en quartier participatives (conseils participatifs) sur deux thèmes , doléances et bienveillance :

  • Qu’est-ce qui ne va pas dans mon quartier mais aussi dans la cité ?
  • Comment je me sens comme bénéficiaire, mais aussi comme acteur de bienveillance ?

A Kingersheim cela s’est traduit concrètement par la réalisation de vrais projets structurants portés par la population dans des séquences démocratiques structurées: l’aménagement du temps de l’enfant, la création d’un parc public, la formalisation d’un éco-quartier ou encore la révision du plan d’urbanisme. Et ce fut aussi la création de la maison de la démocratie, qui appartient aux citoyens, qui est la maison du débat, de la co-construction, de la décision.

Pratiquer une haute qualité démocratique à la façon de Kingersheim, c’est avoir la culture de l’indignation qui part d’une non acceptation de l’évolution actuelle de la société, la culture de l’utopie, du rêve qui imagine un demain plus acceptable et c’est enfin la culture de l’engagement qui amène chacun à prendre part à une œuvre commune.

Cette démarche, très empreinte des principes de l’éducation populaire, est sans aucun doute inspirante lorsque l’on veut penser et mettre en œuvre des politiques publiques dans un esprit de co-construction.