Depuis septembre 2021, la ligue de l’enseignement est allée à la rencontre des publics éloignés de l’emploi en privilégiant la valorisation de la personne, notamment au travers d’une démarche utilisant un outil numérique : l’open badge.
Cette démarche s’inscrivait dans le cadre d’un appel à projet du plan France Relance.
Pendant deux ans, Virginie Letellier, en charge de cette mission, s’est employée à sensibiliser des structures de l’insertion sociale et professionnelle à l’intérêt de cet outil.
Un outil ? « non ! » dira-t-elle !
Ayant construit dans son parcours professionnel une grande capacité à l’écoute, ce qui l’a intéressée, c’est “permettre à chacun de mettre en valeur ce qu’il ne soupçonnait même pas en lui”. Si l’individu est souvent habitué à pointer ce qui ne va pas, là, avec les open badges, il s’agit de cheminer avec la personne et de lui permettre de découvrir quelles compétences elle a acquises au travers de l’ensemble de ces multiples expériences : scolaire, professionnelle mais aussi expériences associatives, collectives, expériences de vie au quotidien (bricoler, élever ses enfants, faire du sport, de la peinture, chanter, écrire, jardiner…).
La compétence, ce n’est pas seulement ce que l’on a appris. Si l’apprentissage n’est pas transformé en quelque chose que l’on saura reproduire ou réinvestir dans n’importe quelle situation, il reste un apprentissage, il ne devient pas une compétence.
« Alors permettre à chacun de s’interroger réellement sur ce qu’il sait faire et refaire dans un contexte approprié, c’est du bonheur ! Une belle expérience », dira Virginie.
En deux ans, elle aura réussi à apprivoiser la démarche, à rencontrer une quarantaine de structures, à initier une soixantaine de professionnels et elle aura proposé des ateliers de valorisation des compétences à plus de 500 personnes de tous âges ; une majorité de jeunes cependant, dont beaucoup sont accompagnés par les missions locales.
Dans tous les témoignages récoltés chacun s’emploie à mettre en avant le bénéfice trouvé.
Pour les professionnels, ce prisme leur a permis incontestablement d’aborder différemment leurs publics, de les écouter autrement, de partir de ce qui est plutôt que des lacunes, de présumer des compétences avant de parler des manques, de rendre visible l’invisible.
Aujourd’hui, de plus en plus de recruteurs vont faire appel à ces compétences, parce que de plus en plus de métiers se dessinent sans avoir de référentiels déterminés. L’open badge prend donc ici tout son sens.
Pour les personnes ayant suivi les ateliers, Virginie parle de « vraies révélations ». Par rapport à eux-mêmes tout d’abord, parce qu’ils ne s’étaient jamais autorisés à penser qu’ils avaient des capacités, des qualités, des compétences. Par rapport aux autres aussi, parce qu’ils ont fait groupe et acquis de la confiance en eux au travers du collectif.
Et maintenant ?
C’est avec tristesse que Virginie doit stopper sa mission…
Un appel à projet n’a qu’un temps et le modèle économique n’est pas pérennisable.
Des besoins ont été révélés, des envies ont été suscitées, mais qui, à l’heure où les collectivités ont le couteau sous la gorge, à l’heure où les associations passent d’un appel à projet à un autre pour maintenir leur activité, à l’heure où l’état se désengage pour se réengager ailleurs dans le meilleur des cas…qui, est en capacité de financer une suite ?
Gageons simplement que tous ceux et celles qui ont croisé les open badge puissent les faire valoir, les utiliser à nouveau, faire de cette valorisation de la personne un moyen de remobilisation, un moyen de changer sa relation à soi, aux autres, au travail, au vivre ensemble.
Et bons vents à Virginie !